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19 décembre 2014 5 19 /12 /décembre /2014 16:13

http://extranet.editis.com/it-yonixweb/IMAGES/PC/P3/9782258070134.JPG

 

 

« Les planches glissèrent sur l’ouverture, éclipsant le cercle de lumière. Le dernier pan de ciel disparut.

Il plaisante, se dit-elle, il veut juste me faire peur. Il va me laisser dans ce trou quelques minutes et il reviendra me chercher. Bien sûr qu’il reviendra.

Elle entendit quelque chose heurter les planches qui couvraient la fosse.

Des pierres. Il empile des pierres par-dessus.

Alice se releva et essaya de grimper. S’agrippa à une longue racine desséchée, qui se rompit aussitôt dans ses mains. Elle enfonça ses ongles dans la terre mais ne trouva aucune prise, ne parvint qu’à s’élever de quelques centimètres avant de retomber. Ses cris percèrent l’obscurité.

— Elijah !

Seul lui répondit le bruit sourd des pierres sur le bois ».

 

 

Que dire ? Je continue de dévorer la série « Rizzoli & Isles » de Tess Gerritsen et « Lien fatal » est vraiment très bon… Le suspens est haletant, les différentes intrigues s’entremêlent à foison pour notre plus grand plaisir…. C’est Maura qui est au centre de l’histoire avec la découverte du cadavre d’une jeune femme qui lui ressemble d’une façon incroyable, juste devant chez elle…. Il se révèle que c’est sa sœur dont elle ne connaissait pas l’existence… Bien évidemment elle mène l’enquête pour son propre compte, pour comprendre et découvrir la vérité, sur elle, ses origines… Son amie Jane tente de la protéger des retombées d’une telle enquête très délicate et perturbante…

Bien écrit, les personnalités des deux « héroïnes » s’affinent… j’ai beaucoup aimé !

A lire bien sûr pour les amateurs du genre.

 

 

« Ce fut le coéquipier de Rizzoli, l’inspecteur Barry Frost, qui vit Maura le premier. Il détourna les yeux, les ramena soudain sur elle, le visage livide. Sans un mot, il tira sa collègue par la manche.

Rizzoli se figea, les lumières bleues des rampes lumineuses soulignant son expression incrédule. Comme en transe, elle s’avança vers Maura.

— Toubib ? murmura-t-elle. C’est toi ?

— Qui veux-tu que ce soit ? Pourquoi tout le monde me pose-t-il cette question ? Pourquoi me regardez-vous tous comme si j’étais un fantôme ?

— Parce que… commença Rizzoli.

Elle s’interrompit, fit de nouveau rebondir ses boucles désordonnées en secouant la tête.

— Bon Dieu ! Un moment, j’ai bien cru que tu en étais un ».

 

 

Résumé éditeur :

Mais voir le corps sans vie de son parfait sosie à de quoi donner des frissons. D'autant plus que, troublante coïncidence, la victime a été assassinée devant la maison de Maura. Epaulée par sa complice de toujours, l'inspecteur Jane Rizzoli, enceinte de huit mois, Maura part sur les traces de ce mystérieux double. Son enquête l'entraîne dans un village côtier du Maine, où l'attendent de surprenantes découvertes. Certaines directement liées à son propre passé...

Une fois de plus, Tess Gerritsen tisse une intrigue à glacer le sang, servie par une plume à la précision chirurgicale. Maternité, secrets de famille et meurtres en série sont les ingrédients de ce suspense parfaitement orchestré.

 

 

« À travers le bredouillis de ses sanglots, elle entendit une porte grincer. Cela venait du garage. Elle se redressa, la poitrine subitement gonflée d’espoir.

Il est rentré ! Il est venu me dire qu’il regrette.

Elle se leva si brusquement qu’elle renversa sa chaise. Étourdie, elle ouvrit la porte, s’avança dans le garage. S’immobilisa, papillonnant des yeux dans l’obscurité, décontenancée. Il n’y avait pas d’autre voiture que la sienne.

— Dwayne ? appela-t-elle.

Un rai de lumière attira son regard : la porte donnant sur le jardin était entrouverte. Mattie traversa le garage pour aller la fermer. Au moment où elle la poussait, elle entendit des pas derrière elle et se figea, le cœur affolé. Prenant conscience, à cet instant même, qu’elle n’était pas seule.

Elle commença à se retourner et l’obscurité vint à sa rencontre ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Gerritsen-Lien-fatal/130550

 

 

« Rizzoli songea à sa propre enfance, à sa famille. Elle avait toujours su qui elle était. Il lui suffisait de regarder ses grands-parents, ses parents, pour voir son arbre généalogique gravé sur leurs visages. Elle était l’une d’entre eux, jusque dans son ADN, et même s’il leur arrivait de l’irriter ou de la gêner, elle savait qu’ils étaient siens.

Maura Isles, elle, ne s’était jamais reconnue dans les yeux d’un de ses grands-parents. Quand elle marchait dans la rue, scrutait-elle les visages des inconnus qu’elle croisait, à la recherche d’une ressemblance ? Un dessin de la bouche ou une courbe du nez familiers ? Rizzoli comprenait parfaitement ce désir de connaître ses origines. De savoir qu’on n’est pas une brindille abandonnée au gré du vent, mais une branche d’un arbre aux racines profondes ».

 

 

« Maura songea aux crimes pour lesquels Amalthea Lank avait été condamnée. À quoi pensait-elle quand elle avait pris les deux sœurs en stop ? Avait-elle été parcourue d’un frisson de plaisir anticipé ? Avait-elle senti une bouffée enivrante de pouvoir ?

— Le simple fait qu’elle lui rend visite devrait te faire comprendre quelque chose, dit Rizzoli.

— Quoi ?

— O’Donnell ne perd pas son temps avec le tout-venant des meurtriers. Elle ne s’intéresse pas au type qui descend la caissière d’un Seven-Eleven pendant un braquage. Ni au mari qui pique une colère contre sa femme et la pousse dans l’escalier. Non, elle passe son temps avec les dingues qui tuent pour le plaisir. Ceux qui remuent le couteau dans la plaie parce qu’ils aiment la façon dont la lame grince sur l’os. Elle passe son temps avec les cas spéciaux. Avec les monstres.

Ma mère, pensa Maura. Est-elle un monstre, elle aussi ? »

 

 

« Maura se tourna vers Rizzoli.

— Tu devrais remonter, Jane. Ils vont préparer le Luminol, il vaudrait mieux que tu n’y sois pas exposée.

— Je croyais que ce n’était pas toxique…

— Ne prends quand même pas le risque. Pas avec le bébé.

— Ouais, d’accord, soupira-t-elle avant de remonter lentement les marches. Mais je n’apprécie pas d’être privée du spectacle.

La porte se referma derrière elle.

— Elle devrait pas être en congé maternité ? s’étonna Yates.

— Il lui reste six semaines, répondit Maura.

Un des techniciens s’esclaffa.

— C’est comme cette femme flic dans Fargo, hein ? Comment on peut faire la chasse aux criminels quand on est en cloque jusqu’aux yeux ?

À travers la porte de la cave, Rizzoli répliqua :

— Je suis peut-être en cloque mais je ne suis pas sourde !

— Elle est armée, en plus, prévint Maura ».

 

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17 décembre 2014 3 17 /12 /décembre /2014 20:56

http://www.gallimard.fr/var/storage/images/product/105/product_9782070146932_195x320.jpg

 

« Il s'était enfin décidé à profiter du silence de la nuit pour relire une dernière fois toutes les feuilles du "dossier". Mais à peine avait-il commencé sa lecture qu'il éprouva une sensation désagréable : les phrases s'enchevêtraient et d'autres phrases apparaissaient brusquement qui recouvraient les précédentes, et disparaissaient sans lui laisser le temps de les déchiffrer. Il était en présence d'un palimpseste dont toutes les écritures successives se mêlaient en surimpression et s'agitaient comme des bacilles vus au microscope.

Il mit cela sur le compte de la fatigue et ferma les yeux ».

 

 

« Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier » ? Et bien moi je me suis perdue… dans la « littérature », dans l’ennui…

Je n’avais jamais lu de Modiano. Une semaine avant qu’il ne soit devenu le Nobel de littérature 2014, une grande interview de Patrick Modiano à la Grande Librairie que je regardais en replay (bien m’en a pris !)… je découvrais donc cet auteur… et je m’étais déjà fermement ennuyée durant l’entretien… l’auteur cherchant ses mots, balbutiant… je m’étais fait la réflexion « Si il écrit aussi peu clairement qu’il ne parle, ça ne doit pas être terrible »… François Busnel était visiblement sous le charme, pas moi, j’ai donc fini par zapper la fin de l’interview.

Une semaine après, le prix Nobel. Je me suis donc dit, « allez ne reste pas sur cette première impression, découvre cet écrivain ! ».

Voilà c’est fait…. Et bien c’est fouillis, ennuyeux, sans grand intérêt et en plus, pour le peu d’histoire qu’il y a, on n’a même pas de réponse à la fin… Une fin en queue de poisson, sans queue ni tête. Bref, décevant au possible. La seule chose positive, ce roman est court donc se lit vite. Ouf !

J’essaierais peut-être d’en lire un autre de Modiano, pour lui donner une chance… mais pas certaine, car il y a tellement de livres et d’auteurs qui me tentent, qui m’appellent… que je n’aurais sans doute pas le temps.

J’imagine que pour les fans de Modiano, et il y en a (je les respecte, chacun ses goûts) il est à lire… pour les autres, fuyez.

 

 

 

 

« On finit par oublier les détails de notre vie qui nous gênent ou qui sont trop douloureux. Il suffit de faire la planche et de se laisser doucement flotter sur les eaux profondes, en fermant les yeux ».

 

 

Résumé éditeur :

« – Et l'enfant? demanda Daragane. Vous avez eu des nouvelles de l'enfant?

– Aucune. Je me suis souvent demandé ce qu'il était devenu... Quel drôle de départ dans la vie...

– Ils l'avaient certainement inscrit à une école...

– Oui. À l'école de la Forêt, rue de Beuvron. Je me souviens avoir écrit un mot pour justifier son absence à cause d'une grippe.

– Et à l'école de la Forêt, on pourrait peut-être trouver une trace de son passage...

– Non, malheureusement. Ils ont détruit l'école de la Forêt il y a deux ans. C'était une toute petite école, vous savez...»

 

 

« Il n’y pensait plus depuis de nombreuses années, si bien que cette période de sa vie avait fini par lui apparaître à travers une vitre dépolie. Elle laissait filtrer une vague clarté, mais on ne distinguait pas les visages ni même les silhouettes. Une vitre lisse, une sorte d’écran protecteur. Peut-être était-il parvenu, grâce à une amnésie volontaire, à se protéger définitivement de ce passé. Ou bien c’était le temps qui avait atténué les couleurs et les aspérités trop vives ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Modiano-Pour-que-tu-ne-te-perdes-pas-dans-le-quartier/632505

 

 

« En poursuivant sa lecture, Daragane éprouvait une impression semblable à celle de la veille lorsqu'il tentait de déchiffrer les mêmes pages : des phrases que vous entendez dans un demi-sommeil, et les quelques mots dont vous vous souvenez au matin n'ont aucun sens ».

 

 

« Il n'avait pas le courage d'entrer dans la maison. Il préférait qu'elle reste pour lui l'un de ces lieux qui vous ont été familiers et qu'il vous arrive parfois de visiter en rêve : ils sont en apparence les mêmes, et pourtant imprégnés de quelque chose d'insolite. Un voile ou une lumière trop crue ? Et vous croisez dans ces rêves des personnes que vous aimiez et dont vous savez qu'elles sont mortes. Si vous leur adressez la parole elles n'entendent pas votre voix ».

 

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14 décembre 2014 7 14 /12 /décembre /2014 17:40

http://decitre.di-static.com/media/catalog/product/cache/1/image/9df78eab33525d08d6e5fb8d27136e95/9/7/8/2/2/5/8/0/9782258062221FS.gif

 

« J’inspecte leurs visages, je cherche mon frère de sang parmi eux. Mon pareil. Je ne le trouve pas, pas ici, même dans cette maison de monstres.

Mais il existe. Je sais que je ne suis pas le seul de mon espèce sur cette terre.

Quelque part, il y en a un autre. Et il m’attend ».

 

 

Suite du Chirurgien de la même Tess Gerritsen, un an après. On fait un peu plus connaissance avec Jane Rizzoli qui vient de passer une mauvaise année après l’arrestation de ce criminel en série, sadique et cruel, qui a bien failli la tuer, et qui lui a laissé des cicatrices douloureuses aux creux de ses mains, mais bien plus encore des cauchemars récurrents et une peur sourde, sournoise. Bien sûr avec son caractère de battante, qui ne veut rien laisser paraître de ses faiblesses, elle n’est pas allée voir un psy… et elle s’en sort comme elle peut. L’inspecteur Korzack fait appel à elle sur un crime en dehors de sa juridiction car ce crime a des similitudes avec ceux du Chirurgien, pourtant enfermé en prison… Commence alors une enquête difficile pour Jane, d’autant plus que le Chirurgien s’évade et fait équipe avec ce nouveau tueur, le Dominateur. Warren Hoyt, le Chirurgien, n’a pas oublié Jane, bien au contraire, elle est au centre de ses obsessions… Suspens bien mené, peut être un peu en dessous du 1er tombe de la série, mais on suit avec plaisir et angoisse l’enquête de Jane qui est obligée de faire équipe avec l’agent Gabriel Dean du FBI…. hé hé vous verrez la suite !

Pour les amateurs du genre, à lire absolument !

 

 

« Rizzoli n’avait pas besoin de confirmation. Elle se tourna vers le mur taché de sang et se rappela la position du corps de Yeager, elle se rappela la tasse brisée sur le parquet. Le point vert phosphorescent sur la carpette confirmait ce qu’elle avait redouté. Elle savait ce qui s’était passé aussi sûrement que si la scène s’était déroulée sous ses yeux ».

 

 

Résumé éditeur :

Depuis que Warren Hoyt croupit derrière les barreaux, l'inspecteur Jane Rizzoli, fleuron de la police criminelle de Boston, souffle un peu: ce tueur en série, surnommé le Chirurgien en raison de son habileté à manier le bistouri, lui a fait subir un calvaire qu'elle n'est pas près d'oublier. Le pire est à venir... Appelée sur les lieux d'un nouveau crime, elle constate que certains détails rappellent les méthodes de l'actuel prisonnier. A une différence de taille: si ce dernier s'attaquait à des femmes seules, le nouvel assassin, lui, n'hésite pas à s'en prendre à des couples. C'est le moment que choisit Hoyt pour s'évader de sa cellule. Dès lors, ce n'est plus un meurtrier qu'il faut arrêter, mais deux, qui ne trouvent rien de mieux que d'associer leurs "talents"...

 

 

« - La nécrophilie, ou "amour des morts", a toujours été un des noirs secrets de l'humanité, dit le Dr Lawrence Zucker. Le mot vient du grec, mais sa pratique est avérée dès l'époque des pharaons. Une femme belle ou de haut rang qui mourait en ce temps-là n'était confiée aux embaumeurs que trois jours au moins après sa mort. Cela pour s'assurer que les hommes chargés de la préparer pour les funérailles n'abusent pas de son corps. Dans toute l'histoire, on trouve trace d'abus sexuels commis sur des morts. On dit que le roi Hérode lui-même aurait eu des rapports sexuels pendant sept ans avec sa femme morte ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Gerritsen-Lapprenti/76404

 

 

« Il y a un an, je me suis battue contre lui et il a failli me tuer. Je ne sais pas si je suis capable de le refaire. De ramener le monstre dans sa cage ».

 

 

« Elle parvint à garder son sang-froid. A demander, avec un calme extrême :

– Vous savez combien de personnes Hoyt a tuées ce matin ? Trois, agent Dean. Un homme et deux femmes. Il leur a tranché la gorge et il est parti, comme ça.

Elle leva les mains, lui montra ses cicatrices.

– Voilà les souvenirs qu’il m’a laissés l’année dernière, avant de passer à ma gorge.

Elle laissa ses bras retomber et eut un rire.

– Alors, oui, vous avez raison, Hoyt me préoccupe ».

 

 

« - Tout le monde respecte les flics. Du moins, c'est l'impression que j'avais quand j'étais gosse. Je voulais la plaque, le flingue. Les choses qui forceraient les gens à me remarquer. Je ne voulais pas finir dans un bureau où je disparaîtrais. Où je deviendrais la femme invisible, ce serait comme être enterrée vivante, être quelqu'un que personne n'écoute. A qui personne ne prête attention.

Elle appuya un coude à la portière et posa sa tête sur sa main.

- Maintenant je commence à trouver des charmes à l'anonymat ».

 

 

« -"Ce n'est pas le Dominateur qui joue avec moi, dit-elle. C'est Hoyt. La planque ratée, c'était pour me briser. Il ne connait pas d'autre façon de traiter une femme : d'abord la briser. La plonger dans la déprime, arracher des morceaux de sa vie....." »

 

 

« C'est charmant, ici dans les bois. Je suis entouré d'un cercle d'arbres dont les cimes percent le ciel comme les flèches d'une cathédrale. Il a plu toute la matinée, mais un rayon de soleil traverse maintenant les nuages et se répand sur le sol, où j'ai planté quatre piquets. Excepté le bruit des gouttes qui tombent des feuilles, tout est silencieux.

J'entends un battement d'ailes et, levant la tête, découvre trois corbeaux perchés dans les branches au dessus de moi. ils m'observent avec une intensité étrange, comme s'ils devinaient la suite. Ils savent déjà à quoi cet endroit va servir et ils attendent attirés par une promesse de charogne ».

 

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13 décembre 2014 6 13 /12 /décembre /2014 14:58

http://media.paperblog.fr/i/326/3262323/ecriture-memoires-dun-metier-stephen-king-L-1.jpeg

 

« Ce livre n'est pas bien long, pour la simple raison que la plupart des livres qui parlent d'écriture sont pleins de conneries. Les romanciers, moi y compris, ne comprennent pas très bien ce qu'ils font, ni pourquoi ça marche quand c'est bon, ni pourquoi ça ne marche pas quand ça ne l'est pas. J'imagine qu'il y aura d'autant moins de conneries ici que le livre sera court ».

 

 

J’aime Stephen King… découvert par hasard, il y a bien longtemps maintenant, avec Simetierre… je ne savais pas à quel genre de littérature je m’attaquais… je l’aurais su, je n’aurais peut être pas tenté l’expérience… en tout cas, cela m’a plu et j’ai récidivé. Quand il est venu récemment en tournée pour la première fois en France, François Busnel et la Grande Librairie sur France 5 lui ont consacré une émission spéciale. Interview d’une heure que j’ai beaucoup appréciée. Il m’est apparu un homme simple qui n’avait pas pris la grosse tête, malgré tous les livres vendus, qui aimait ce qu’il faisait et qui en parlait bien, avec simplicité, sincérité et enthousiasme. C’est lors de cette émission que j’ai entendu parler pour la 1ère fois de ce livre « Ecriture : Mémoires d'un métier »… Et comme j’ai toujours aimé lire, et écrire m’a toujours un peu titillé… je me suis promis de le lire. C’est chose faite et j’ai beaucoup aimé. J’y ai retrouvé la personnalité fort sympathique et sincère de Stephen King… La première partie du livre est un peu comme une « autobiographie » car il nous parle de son enfance, de son adolescence et de sa vie de jeune marié puis de jeune père de famille… et surtout de ses liens à la lecture et à l’écriture. Les tout débuts, puis enfin la « réussite ». C’est savoureux, intéressant, drôle parfois, tendre aussi… je me suis régalée. Bien sûr, je n’ai pas le même âge que lui, et je suis française… certaines références m’ont manqué… pas grave, il fait revivre une Amérique des années 50-60-70 et c’est chouette. Toute la 2e partie, il s’applique à donner des éléments pour pouvoir s’essayer à l’écriture. Il nous livre son expérience, les règles qu’il en a tirées et ce qui marche pour lui. C’est passionnant. Et à la fin, il nous parle d’un accident très grave qui aurait pu lui coûter la vie qui s’est déroulé lors de l’écriture de ce livre… comment il a repris l’écriture, ce que ça lui a apporté…

Oui un livre sincère, intéressant, passionnant…. à lire pour ceux qui aiment Stephen King et ceux qui désirent écrire. Mais pas seulement, pour ceux aussi qui aiment la lecture… et nous sommes nombreux ! Bonne découverte.

 

 

« Finalement, je montrai l’un de ces plagiats hybrides à ma mère et elle en fut charmée ; je me souviens de son sourire teinté de stupéfaction, comme si elle avait du mal à croire qu’un de ses enfants puisse être aussi intelligent – un véritable petit prodige, en vérité. Jamais je ne lui avais vu cette expression auparavant ; en tout cas, pas suscitée par moi. J’en étais absolument ravi.

Elle me demanda si j’avais inventé cette histoire tout seul, et je fus obligé d’admettre que, pour l’essentiel, je l’avais trouvée dans une de mes bandes dessinées. Elle parut déçue, ce qui fit s’évaporer une bonne partie de mon plaisir. Finalement, elle me rendit mon cahier. « Écris ta propre histoire, Stevie, me dit-elle. Ces Combat Casey ne valent rien. Il est toujours en train de faire cracher ses dents à quelqu’un. Je parie que tu peux faire mieux. Inventes-en une toi-même. »

Je me souviens d’un fabuleux sentiment de possibilité à cette idée, comme si l’on venait de m’introduire dans un vaste bâtiment rempli de portes fermées en m’autorisant à ouvrir n’importe laquelle. Il y avait plus de portes à pousser qu’on ne pouvait en franchir au cours de toute une vie – voilà ce que je me dis, et voilà ce que je pense toujours ».

 

 

Résumé éditeur :

Quand Stephen King se décide à écrire sur son métier et sur sa vie, un brutal accident de la route met en péril l'un et l'autre. Durant sa convalescence, le romancier découvre les liens toujours plus forts entre l'écriture et la vie. Résultat: ce livre hors norme et génial, tout à la fois essai sur la création littéraire et récit autobiographique. Mais plus encore révélation de cette alchimie qu'est l'inspiration. Une fois encore Stephen King montre qu'il est bien plus qu'un maître du thriller: un immense écrivain. La vie n’est pas faite pour soutenir l'art. C est tout le contraire.

 

 

« C’est ma femme qui fit toute la différence pendant les deux années où j’enseignai à Hampden (et où je lavai des draps à la blanchisserie New Franklin pendant les vacances d’été). Si elle avait un instant laissé entendre que je perdais mon temps, lorsque j’écrivais mes petites histoires dans notre maison louée de Pond Street, ou dans la lingerie de notre caravane de location de Klatt Road à Hermon, je crois que j’aurais perdu une bonne partie du cœur que je mettais à l’ouvrage. Mais Tabby n’a jamais manifesté le moindre doute. Son soutien a été constant, est resté l’une des rares bonnes choses sur lesquelles je pouvais toujours compter. Et, chaque fois que je vois un premier roman dédié à une épouse (ou un mari), je souris et je pense : Il y a une personne qui sait. Écrire est un boulot solitaire. Avoir quelqu’un qui croit en vous fait une sacrée différence. Ce quelqu’un n’a pas besoin de faire de discours. Qu’il croie en vous est en général suffisant ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/King-Ecriture--Memoires-dun-metier/12274

 

 

« Ce livre doit paraître, selon ce qui a été prévu, en l’an 2000, à la fin de l’été ou au début de l’automne. Si les choses se sont bien passées, vous êtes quelque part plus loin que moi dans le flot du temps… mais vraisemblablement, dans votre propre lieu pour voir loin, celui où vous allez pour recevoir les messages télépathiques. Non pas que vous ayez besoin d’y être réellement ; les livres sont des instruments de magie portables qui n’ont pas leur pareil ».

 

 

« Si vous voulez devenir écrivain, il y a avant tout deux choses que vous devez impérativement faire : lire beaucoup et beaucoup écrire. Il n'existe aucun moyen de ne pas en passer par là, aucun raccourci ».

 

 

« Si "Lis beaucoup, écris beaucoup" est le Commandement Suprême (et je vous assure qu'il l'est) que veut dire, en pratique, écrire beaucoup ?

la réponse varie, bien entendu, en fonction des auteurs. L'une de mes histoires préférées sur le sujet, qui relève sans doute du mythe, concerne James Joyce. Un ami venu lui rendre visite un jour aurait trouvé le grand homme vautré sur sa table de travail, au comble du désespoir.

- Qu'est-ce qui ne va pas James ? demanda l'ami. C'est le travail ?

Joyce hocha la tête sans même lever les yeux sur son ami. Bien entendu, c'était son travail, n'était-ce pas toujours son travail ?

- Combien de mots as-tu écrits aujourd'hui ? voulut savoir l'ami.

Joyce, toujours désespéré, toujours le nez dans ses feuilles :

- Sept...

- Sept ? Mais voyons James, c'est bien, au moins pour toi !

- Oui, répondit Joyce, relevant enfin la tête, je suppose... Mais je ne sais pas dans quel ordre les mettre ! »

 

 

« Je sors de la classe moyenne inférieure américaine, et c'est à elle qu'appartiennent les personnes dont je peux parler avec le plus d'honnêteté, car ce sont celles que je connais le mieux. Ce qui veut dire qu'ils disent plus souvent merde que flûte quand ils se tapent sur les doigts, mais ça ne me tracasse pas beaucoup. En vérité, ça ne m'a jamais vraiment tracassé ».

 

 

« Nous avons été élevés dans des religions différentes ; mais en tant que féministe, Tabitha n'a jamais été une catholique acharnée, car ce sont les hommes qui édictent les règles chez les catholiques et les femmes qui lavent les sous-vêtements ».

 

 

« Les écrivains consommant des drogues ne sont ni plus ni moins que des consommateurs de drogue - des ivrognes et des drogués de la variété courante, en d'autres termes. Prétendre que les drogues et l'alcool sont nécessaires pour atténuer les effets d'une sensibilité exacerbée, c'est avancer un ramassis de conneries simplement pour se justifier ».

 

 

« Écrivez ce que vous avez envie d’écrire, insufflez-y de la vie et rendez votre texte unique en y mêlant ce que vous savez de l’existence, de l’amitié, des relations humaines, du sexe, du travail ».

 

 

« Ce qu'il faut avant tout se rappeler à propos du contexte peut se résumer ainsi : (a) tout le monde a une histoire, et (b) elle est pour l'essentiel sans intérêt. Tenez-vous-en aux parties intéressantes, ne vous laissez pas entraîner par le reste. Les "histoires de ma vie" qui n'en finissent pas, c'est aux barmans qu'on les raconte, et seulement une heure ou deux avant la fermeture. Et si vous consommez ».

 

 

« La télé arriva donc relativement tard chez les King, et j'en suis content. Je fais partie, si l'on y réfléchit, d'un groupe passablement restreint : la dernière poignée d'écrivains américains qui ont appris à lire et à écrire avant d'apprendre à ingurgiter leur portion quotidienne de vidéo-conneries ».

 

 

« Il n’est pas incongru de se demander si Paul Sheldon, dans Misery, ne serait pas moi. Certaines parties du personnage le sont… mais si vous continuez à écrire de la fiction, je crois que vous vous rendrez compte que tous les personnages que vous créerez sont un peu vous-même. Lorsque vous vous demandez ce que tel ou tel personnage va faire, dans une situation donnée, vous décidez en fonction de ce que vous feriez (ou au contraire ne feriez pas, dans le cas où ce personnage est le méchant). En plus de ces versions de vous-même, il y a les traits, agréables ou pas, propres au personnage, que vous avez observés chez les autres (le type qui se cure le nez quand il croit ne pas être vu, par exemple). Il y a aussi un merveilleux troisième élément : l’imagination pure. C’est elle qui m’a permis d’être l’infirmière psychotique, le temps que j’écrive Misery. Dans l’ensemble, être Annie Wilkes n’a pas été dur. C’était même assez rigolo. Incarner Paul a été plus difficile, je crois. Il était sain d’esprit, je le suis aussi, pas de quoi en faire des tartines ».

 

 

« L’écriture ne m’a pas sauvé la vie – c’est au talent du Dr David Brown et à la sollicitude aimante de ma femme que je la dois –, mais elle a continué à faire ce qu’elle avait toujours fait pour moi : rendre ma vie plus lumineuse et plus agréable.

Écrire n’a rien à voir avec gagner de l’argent, devenir célèbre, draguer les filles ou se faire des amis. En fin de compte, écrire revient à enrichir la vie de ceux qui liront vos ouvrages, mais aussi à enrichir votre propre vie. C’est se tenir debout, aller mieux, surmonter les difficultés. Et faire qu’on soit heureux, d’accord ? Oui, faire qu’on soit heureux ».

 

 

« Écrire est magique, écrire est l'eau de la vie au même titre que n'importe quel art. L'eau est gratuite. Alors, buvez. Buvez, buvez à satiété ».

 

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10 décembre 2014 3 10 /12 /décembre /2014 16:20

http://ekladata.com/IF119AmQk5iqMuC6OSBldgA4htc.jpg

 

« Tout est noir autour de lui et il en crève de peur. Car il sait que la mort n’est rien d’autre que ça : le froid, l’obscurité. L’immobilité. Et aussi une douleur sans fin, parfois.

Il n’a pas le temps de penser. Pas le temps de raisonner. Il desserre ses mâchoires et s’entend crier à s’en faire éclater la gorge. Cela l’emplit d’une joie désespérée.

Il est donc bien vivant.

Fou de douleur, mais vivant ».

 

 

Un énorme coup de cœur pour ce roman très original « Trois oboles pour Charon »… Vraiment ! Je ne connaissais pas l’auteur, Franck Ferric, et ma PAL (pile à lire) est tellement impressionnante que je serais sans aucun doute passée à côté sans l’opération Masse critique qu’organise Babélio que je tiens à remercier vivement ainsi que les éditions Denoël. J’ai pu ainsi découvrir ce petit bijou de littérature.

J’ai été étonnée, happée par la fulgurance de l’écriture au début du livre… L’auteur est tellement original, différent dans son écriture et ses propos qu’on est pris dans cette drôle d’histoire et qu’on suit ce « héro » dans ses renaissances successives.

Le résumé de l’éditeur nous dit qu’il s’agit de Sisyphe… mais franchement quand on démarre le livre, on ne le sait pas du tout et rien ne le laisse présager, et le grand Borgne, « héro » de cette histoire, n’en sait pas plus que nous. Car sa mémoire, ses souvenirs lui sont perdus…ou plutôt lui ont été retirés. Il ne sait où il se trouve, ni comment il s’appelle, ni à quelle époque. Quant à Sisyphe je n’en savais pas grand-chose, à part ce mythe grec d’un homme condamné par les Dieux à pousser sur ses épaules un rocher en haut d’une montagne… rocher qui redescend chaque jour, et que lui remonte également chaque jour… Punition des Dieux pour les avoir défiés.

Ce roman appartient à un genre de littérature bien particulier, l’uchronie. « Dans la fiction, l’uchronie est un genre qui repose sur le principe de la réécriture de l’Histoire à partir de la modification d’un événement du passé » selon Wikipédia.

On finit par comprendre que cet homme, borgne (une pièce en or usée recouvre son œil vide), plus haut que la moyenne (géant), d’une grande force, parlant et comprenant toute langue qu’il entend, mais sans aucune mémoire, renait sans fin dans des endroits de frontières, toujours au cœur de la guerre, dans des lieux inconnus de lui, ainsi que des temps tout aussi inconnus. Après un laps de temps plus ou moins long, il meurt, toujours de manière brutale, et revient à « la vie », aux Enfers… pour rencontrer Charon, le passeur. Comme il ne peut lui payer son obole, il repart dans le monde des mortels, pour un cercle sans fin… avec sur son corps, toutes les cicatrices de ses vies multiples….

Ce plus-qu’Homme est très particulier, vous l’aurez compris. Il a un sale caractère, est brutal, mais malgré tout, on finit par s’attacher à lui et le prendre en pitié. Le mérite-t-il ? Comment tout cela se termine ? Je vous invite vivement à lire cet ouvrage pour le découvrir. C’est très bien écrit, très bien documenté également…. je pense que si ses autres ouvrages sont de la même qualité, je vais continuer à lire Franck Ferrie.

Très belle découverte que je vous souhaite.

 

 

« Et il a beau retourner le problème dans les sens, l’observer sous chaque angle, son incompréhension ne fait que croître.

Déserteur. Revenant. Imposteur. Emissaire des dieux.

Bien qu’il ait l’intuition qu’une once de vérité se cache derrière toute cette confusion, il ne sait toujours pas qui il est. Sinon sur une frontière disputée, il ne sait pas non plus où il est. Mais pis encore : sa conversation avec le vieux paysan lui a laissé la désagréable impression de ne pas savoir non plus quand il est. De quelle année, de quel siècle ? Il en vient à se demander : lui-même, quel âge a-t-il ?

La seule chose dont il soit certain, c’est qu’il n’est pas fou, qu’il a froid et qu’il veut rester en vie, coûte que coûte. L’idée même de la mort le révulse d’une manière qui n’a rien à voir avec la peur et qu’il ne s’explique pas. Même s’il sait cette pensée insensée, il a l’impression de trop bien connaître la Faucheuse pour prendre le risque de l’embrasser ».

 

 

Résumé éditeur :

Pour avoir offensé les dieux et refusé d'endurer sa simple vie de mortel, Sisyphe est condamné à perpétuellement subir ce qu'il a cherché à fuir : l'absurdité de l'existence et les vicissitudes de l'Humanité. Rendu amnésique par les mauvais tours de Charon – le Passeur des Enfers qui lui refuse le repos –, Sisyphe traverse les âges du monde, auquel il ne comprend rien, fuyant la guerre qui finit toujours par le rattraper, tandis que les dieux s'effacent du ciel et que le sens même de sa malédiction disparaît avec eux.

Dans une ambiance proche du premier Highlander de Russell Mulcahy, Trois oboles pour Charon nous fait traverser l'Histoire, des racines mythologiques de l'Europe jusqu'à la fin du monde, en compagnie du seul mortel qui ait jamais dupé les dieux.

 

 

« "Je ne te crois pas. Tu sembles plus malin que tu veux bien en donner l’air. Je vais te délier la langue".

Très vite, les drilles du capitaine reviennent avec un brasero, un long fer à marquer dont le tampon figure un clou barrant un « s ». Et deux coudées de corde rêche et noire que le Boulc’h saisit aussitôt.

"Quand j’en aurai fini avec toi, tu seras aussi souple que du cuir du Danemark. Peut-être bien qu’alors, la peau d’un grand gaillard tel que toi vaudra quelque chose !"

Et son fouet me frappe. A la tête, aux flancs. Ma peau se fend, et très vite la chair est à vif. Lorsque je m’efforce de le faucher avec mes jambes, ses deux larbins me corrigent à coups de bâton aux genoux et dans les parties. Puis l’un d’eux m’asperge de vinaigre. La brûlure est atroce, mais je la garde entre mes mâchoires. Le regard du Boulc’h est mauvais. J’y lis qu’il ne s’arrêtera pas avant d’avoir obtenu de moi une réponse qui le satisfasse. Il menace :

"Tu es dur, le Borgne. Mais crois-moi : tu parleras. Même si pour ça, je dois t’éreinter jusqu’à l’os. D’où viens-tu ? La vérité !" »

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Ferric-Trois-Oboles-pour-Charon/639033

 

 

« "Nous n’avons vu d’homme aussi haut que toi nulle part. Tu n’es pas du peuple de ceux-là. D’où viens-tu ?"

Maussade, le géant désigne le tronc enflammé d’Irminsul et grogne :

"Du creux de cet arbre.

- Tu ne te facilites pas les choses, sais-tu ? Réponds canaille : d’où viens-tu, avec ton œil d’or et ta barbe drue ?"

Le Plus-qu’Homme sent ses veines bouillir. Il voit tournés vers lui les yeux humiliés des Saxons, ceux impatients des Francs. Ceux fermés de Detlef. Il tonne :

"Je t’ai dit, vieillard : du creux de l’arbre qui brûle derrière toi. Et si tu n’ordonnes pas à tes chiens de me libérer de mes liens, toi qui jouis de l’autorité d’un plus haut que toi, je te dis aussi que je ferai subir à ta tête ce que toi et l’autre vieux avez fait subir à la sienne".

Le borgne parle avec calme, sans aucune peur, et désigne le billot de la pointe du menton. D’un mot, l’interprète commande aux gardes de lui apprendre à obéir à plus fort que lui. Cinq soldats s’empressent de lui assener des coups de bâton aux épaules et dans les genoux. Une fois le prisonnier à terre, des mains gantées d’acier tirent fort sur sa tignasse et le traînent jusqu’aux pieds de l’interprète, qui le menace du doigt et poursuit, impérieux :

"Renonces-tu au diable ? Acceptes-tu de te soumettre à la Crois ?

- Chien ! Il n’y a aucun dieu qui mérite que je courbe l’échine devant lui". »

 

 

« Le vieillard me toise et soupire. Il grimace d’ennui :

"Mille fois je t’ai vu revenir devant moi. Mille fois j’ai entendu les mêmes questions : qui suis-je ? Où vais-je ? Par la faute de qui ? Je suis si fatigué de t’entendre geindre contre ton sort, menacer pour rien, t’insurger contre le vent. La récurrence de tes visites gâche mon éternité, le sais-tu ? Il m’est même arrivé de boire un peu des eaux de l’oubli pour effacer ton souvenir.

- Je ne sais pas de quoi tu parles, vieille cloche. Mais sois certain que je ne suis pas ici de bonne grâce. Et que ta compagnie ne m’est pas non plus des plus plaisantes.

- Et bien finissons-en ! Sacrifions au rituel. Je te demande : trois oboles pour le Passeur, ou bien une éternité de langueur ?"

Alors qu’il prononce ces mots comme s’il s’agissait d’une formule pour me faire disparaître, il tend une main dont la paume est recouverte de tatouages. Je crois y reconnaître une carte. Il garde un long moment cette position qui le rend semblable au roi des mendiants. Si j’étais plus proche, je cracherais dans cette main. Je me contente de grogner :

"Je n’ai d’autres richesses que cette pièce sur mon œil borgne, que je ne peux pas retirer. Et tu le sais.

- Oui, je le sais. Mais c’est mon rôle d’exiger l’obole à ceux qui veulent passer, et de refuser le passage à ceux qui ne donnent rien.

- C’est un rôle absurde.

- C’est le mien. Et il n’est pas plus absurde que celui du maudit condamné à rouler sans fin son rocher jusqu’en haut de la montagne, avant de l’y laisser choir et de recommencer son ascension ».

 

 

« L'unique chose qui parvenait encore à me convaincre d'avancer était l'ennui.

Le Maubec me l'avait appris : rester seul avec soi-même trop longtemps menait à la folie. Et j'étais d'un tempérament trop solide, trop borné, trop sanglier pour laisser facilement la démence m'envahir. Toujours, la lassitude l'emportait sur l'inertie, et alors il fallait que je me lève ».

 

 

« Voilà que tu découvres enfin une vérité du monde : est vivant celui qui se bat. Il n’y a que les morts pour savoir la paix ».

 

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8 décembre 2014 1 08 /12 /décembre /2014 17:11

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« Elle avait vécu assez longtemps pour savoir qu’elle était en train de mourir.

Et quand tout est fini, quand cessent les affres de l’agonie, tu nous laisses ta carte de visite. Tu plies soigneusement la chemise de nuit de la victime et tu la ranges sur la coiffeuse. Pourquoi ? Est-ce quelque bizarre marque de respect pour la femme que tu viens d’assassiner ? Ou bien une façon de te moquer de nous ? Ta manière de nous dire que tu es maître de la situation ? »

 

 

Je n’ai pas résisté à la tentation. Il me fallait lire le premier tome de la saga « Rizzoli and Isles » de Tess Gerritsen. Bon le docteur Isles n’est pas encore arrivée, et Jane Rizzoli est bien là, mais n’a pas forcément le rôle principal. Elle a affaire ici au Chirurgien qui sera dans la série télé mais de manière un peu différente. Pas grave du tout, car disons le tout net, ce thriller est excellent. Terrifiant à souhait, crimes en série horribles et suspens très bien mené. Vraiment j’ai beaucoup aimé. Que dire de plus ? Pour les amateurs du genre, à découvrir absolument.

 

 

« Rizzoli n'était pas laide, mais alors que les autres femmes se maquillaient ou mettaient des boucles d'oreilles, elle semblait bien décidée à ne rien faire pour s'embellir. Elle portait des ensembles sombres sinistres qui ne flattaient pas sa charpente menue et négligeait complètement sa tignasse noire bouclée. Elle était comme elle était : ou bien on l'acceptait, ou on allait se faire foutre. Il comprenait cette attitude ; elle lui était vraisemblablement nécessaire pour survivre comme femme flic ».

 

 

Résumé éditeur :

A Boston, de nos jours. Des jeunes femmes sont retrouvées à leur domicile, après avoir été torturées et tuées. Même modus operandi que ceux d'un serial killer qui avait sévi en Géorgie trois ans auparavant. Mais pour la brillante Jane Rizzoli et son équipier Thomas Moore, inspecteurs de la brigade criminelle, cette nouvelle enquête s'annonce plus déroutante que jamais : le tueur en question a trouvé la mort, de la main même de sa dernière victime, des années auparavant. Ayant miraculeusement survécue, cette dernière, aujourd'hui médecin reconnue, a refait sa vie à Boston, justement. Coïncidence ? Rizzoli et le très intègre "Saint Thomas" vont tout faire pour éviter que le "Chirurgien" n'opère de nouveau...

 

 

« D’après d’autres femmes, dès que vous racontez à un homme ce qui vous est arrivé, dès que vous prononcez le mot « viol », il bat en retraite. Comme si vous étiez une denrée avariée. Les hommes n’ont pas envie d’entendre parler de ça. Ils préfèrent le silence aux confessions. Mais le silence s’éternise. Il devient envahissant, jusqu’au moment où vous devenez incapable de parler de quoi que ce soit. L’ensemble de votre vie devient un sujet tabou ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Gerritsen-Le-Chirurgien/9305

 

 

« Un violeur ne disparait jamais de votre vie. Tant que vous vivez, vous êtes sa propriété ».

 

 

« Le doigt sur la détente, le cœur battant, Moore s'approcha sans bruit de la porte et la poussa avec le pied.

L'odeur de sang, tiède et fétide, l'assaillit. Il trouva l'interrupteur et alluma. Avant que l'image ne s'imprime sur sa rétine, il savait ce qu'il allait voir. Il n'était pourtant pas préparé à une telle horreur.... »

 

 

« - Vous savez, Moore, vous avez beau prétendre que vous respectez les femmes pour leur 'esprit', que vous les admirez pour leur 'intelligence', vous tombez amoureux pour les mêmes choses que les autres hommes. Pour leur cul et leurs nichons ».

 

 

« — OK. Reste la question numéro un. Capra mort, comment ce petit souvenir est-il arrivé entre les mains du Chirurgien ?

Moore n’avait pas de réponse. Deux assassins, un vivant, un mort. Quel était le lien entre ces deux monstres ? Ce n’était pas seulement de l’énergie psychique ; il avait pris maintenant une dimension matérielle. Quelque chose que l’on pouvait voir et toucher ».

 

 

« Personne n’envisage la possibilité que l’ennemi soit à l’intérieur des murs. Qu’il soit là, à côté de sa victime.

Tout en tournant la petite cuillère dans mon café je songe au cheval de Troie.

Je décroche le téléphone.

— Helen, service de chirurgie, répond la réceptionniste.

— Pourrais-je voir le Dr Cordell cet après-midi ? Demandé-je ».

 

 

« — Il va la garder en vie pendant quelque temps, dit Zucker. Comme il a gardé en vie Nina Peyton une journée entière. Il maîtrise parfaitement la situation. Il peut prendre son temps.

Un frisson parcourut Rizzoli quand elle réfléchit à ce que signifiaient ces mots : « prendre son temps ». Elle se demanda combien le corps compte de terminaisons nerveuses et combien de souffrances il faut endurer avant que la mort ne vienne vous délivrer. Elle jeta un coup d’œil de l’autre côté de la salle de réunion et vit Moore laisser tomber sa tête dans ses mains. Il avait l’air malade, épuisé. Il était plus de minuit et tous les visages autour de la table étaient cireux et exprimaient le découragement ».

 

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3 décembre 2014 3 03 /12 /décembre /2014 15:44

http://extranet.editis.com/it-yonixweb/IMAGES/PC/P3/9782258065260.JPG

 

« C’est là, se dit-il. C’est là que ça s’est passé.

Sa respiration lui parut tout à coup assourdissante. Le cœur battant, il ôta son sac à dos, tira la fermeture éclair, prit son appareil photo.

Réunir le maximum de preuves, pensa-t-il. Les gars d’Octagon vont essayer de te faire passer pour un mythomane. Ils feront tout ce qui sera en leur pouvoir pour te discréditer, alors prépare tes arrières. Tu as intérêt à avoir un dossier en béton. Il faudra que tu puisses prouver ce que tu racontes.

Il s’avança dans la clairière, vers un amas de branches noircies. En les écartant du bout du pied, il réveilla une odeur de bois brûlé. Un frisson lui parcourut la colonne vertébrale. Il recula.

Les restes d’un bûcher funéraire ».

 

 

J’aime beaucoup la série TV « Rizzoli and Isles » et j’avais très envie de lire les livres qui étaient à l’origine de cette série…. tout en redoutant la déception que j’ai déjà éprouvée avec la série Bones (tiens une médecin légiste aussi !) et les livres de Kathy Reichs. Je n’ai lu qu’un tome car trop différent et beaucoup moins rythmé que la série, cela ne m’a pas trop plu… Ici avec Tess Gerritsen et ses 2 héroïnes, l’inspecteur Jane Rizzoli et la médecin légiste Maura Isles, point de déception. Certes il y a des différences dans les caractères, dans le look et également dans les personnages secondaires (Frost qui est un jeune inspecteur noir dans la série TV se retrouve ici, toujours inspecteur mais blanc, et avec un caractère un peu différent !).

Pour être honnête, cela étonne un peu parfois, mais cela ne gêne pas du tout, car l’écriture est bonne, le suspens bien mené, on ne lâche pas le livre avant de savoir le fin mot de l’histoire… et la grande amitié qui lie le duo dans la série va sans doute se mettre en place au fil des romans, car j’ai lu, un peu par hasard (le titre me plaisait), le 3e tome. Donc je pense que la complicité qu’on pressent entre les deux femmes va s’accentuer pour devenir amitié au fil du temps. J’avoue aussi que voir Jane Rizzoli enceinte est surprenant ! Mais pourquoi pas !!! À suivre comme on dit… car je vais, c’est évident, lire d’autres aventures de ce duo !

 

 

« – On sait ce qui s’est passé ? Que disent les sœurs ?

– On a du mal à en tirer quelque chose d’utile. Il n’y a plus que quatorze religieuses, maintenant, et elles sont dans tous leurs états, tu penses. Elles se croyaient en sûreté, ici. Sous la protection de Dieu. Et voilà qu’un dingue s’introduit chez elles… »

 

 

Résumé éditeur :

Surnommée la Reine des Morts par ses collègues, Maura Isles est sans aucun doute le meilleur médecin légiste de Boston, celle qui mieux que personne sait faire parler les corps...

Aussi quand, dans une froide chapelle de l'abbaye de Graystones, on retrouve le cadavre d'une jeune novice, l'inspecteur Jane Rizzoli fait-elle tout de suite appel à Maura pour résoudre ce crime particulièrement odieux. L'autopsie révèle un lourd secret qui jette le trouble dans la petite communauté des religieuses et rend l'enquête délicate et complexe ...

Jane et Maura conjuguent leurs forces pour percer les mystères de Graystones alors qu'elles sont chacune à un tournant de leur vie sentimentale puisque Jane est enceinte et Maura confrontée au retour de son ex-mari.

Une intrigue haletante menée par Jane Rizzoli et Maura Isles, un duo de choc déjà plébiscité par des milliers de fans dans le monde.

 

 

« Les morts ont tout leur temps. Ils ne se plaignent pas, ils ne vous menacent pas, ils n'essaient pas de vous manipuler.

Les morts sont inoffensifs; le mal est l'apanage des vivants ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Gerritsen-La-reine-des-morts/157031

 

 

« Elle se tourna vers Rizzoli.

– Tu es catholique, Jane ?

Rizzoli grogna tout en fouillant dans le placard de Camille.

– Quand as-tu cessé de croire en Dieu ?

– A peu près au moment où j’ai cessé de croire au père Noël. Je n’y ai jamais cru, même pour ma confirmation. Mon père ne s’en est pas encore remis. Quelle penderie de merde ! « Voyons, que vais-je mettre aujourd’hui ? La robe noire ou la robe de bure ? » Comment une jeune fille saine d’esprit peut-elle vouloir être bonne sœur ?

– Toutes les religieuses ne portent pas l’habit. Pas depuis Vatican II, en tout cas.

– D’accord, mais cette histoire de chasteté n’a pas changé. T’imagines, pas de sexe jusqu’à la fin de tes jours ?

– Je ne sais pas, dit Maura. Ce doit être un soulagement de ne plus penser aux hommes.

– A mon avis, c’est surtout impossible ».

 

 

« Elle frappa à la porte et appela :

– Il y a quelqu’un ? C’est le médecin légiste !

La porte s’ouvrit à la volée, et le faisceau d’une torche se braqua vers son visage. Elle ne voyait pas l’homme qui la tenait, mais elle reconnut la voix de l’inspecteur Darren Crowe :

– Salut, doc. Bienvenue au royaume des cafards.

– Ça vous embêterait de braquer votre lampe d’un autre côté ?

Le rayon s’écarta de son visage, et elle vit sa silhouette, large d’épaules, vaguement menaçante. C’était l’un des plus jeunes inspecteurs de la brigade criminelle, et, chaque fois qu’elle travaillait sur une affaire avec lui, elle avait l’impression de pénétrer sur le plateau d’une série télé dont il serait la vedette, un flic de feuilleton au brushing impeccable et à l’attitude qui allait avec : l’air crâne de celui à qui on ne la fait pas. Pour ce quelle en savait, la seule chose susceptible d’en imposer aux hommes comme Crowe chez une femme, c’était un professionnalisme glacé. Eh bien, il n’allait pas être déçu. Les médecins légistes hommes avaient toujours la possibilité de se la jouer grande gueule avec Crowe, mais, elle, elle ne le pouvait pas. Et elle devait absolument maintenir les barrières, garder ses distances, sans quoi il trouverait une façon d’entamer son autorité ».

 

 

« Rizzoli renifla et s’essuya le visage avec la main.

– Il n’y a rien à décider.

– Qu’est-ce que tu vas faire ?

– Je ne peux pas le garder. Tu le sais bien.

– Et pourquoi pas ?

Rizzoli lui jeta le regard qu’on réserve aux idiots congénitaux.

– Qu’est-ce que je ferais d’un bébé ?

– Ce que tout le monde en fait.

– Attends, tu me vois en maman ? ricana Rizzoli. Je ferais une mère lamentable. Le gamin ne survivrait pas deux semaines, avec moi !

– Les enfants ont une résilience stupéfiante, tu sais.

– Ouais, d’accord, eh bien, résilience ou pas, c’est pas mon truc.

– Tu étais très bien avec la petite fille, Noni.

– Ouais…

– Non, vraiment, Jane, sans rire. Et elle a bien réagi avec toi. Alors qu’elle m’a ignorée, et qu’elle rentrait la tête dans les épaules devant sa mère. Mais, vous deux, vous avez été copines tout de suite.

– Ça ne veut pas dire que j’aie la fibre maternelle ».

 

 

« Pas de tonalité.

La terreur explosa en elle comme un vent glacé.

Il a coupé la ligne téléphonique.

Elle lâcha le combiné et resta debout, aux aguets, s’efforçant désespérément de deviner ce qu’il s’apprêtait à faire. La maison craquait et grinçait dans le vent, masquant tous les sons à l’exception des battements du sang à ses tempes.

Où est-il ? Où est-il ? »

 

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30 novembre 2014 7 30 /11 /novembre /2014 16:13

http://toutelaculture.com/wp-content/uploads/2014/10/tristessedelaterre.jpg

 

« La destruction d'un peuple se fait toujours par étapes, et chacune est, à sa manière, innocente de la précédente ».

 

 

J’avais très envie de lire ce livre… il m’a déjà attiré par sa photo de couverture qui est juste magnifique… Un titre, aussi, qui me plaisait « Tristesse de la terre », poétique et interpellant. Et puis j’ai toujours été intéressée par les peuples des premières nations comme disent les Québécois. A cet égard, je vous recommande l’excellent livre de Philipp Meyer « Le fils » qui fait partie également de la rentrée littéraire. Donc je me suis lancée dans cette aventure qui casse le mythe du héro du Far-West qu’est Buffalo Bill. Car le sous-titre du livre est bien « Une histoire de Buffalo Bill Cody ». C’est un livre relativement court qui se lit vite et bien, car très bien écrit. Il est à la fois très documenté et passionnant, engagé aussi (ça me plait), mais aussi parfois un peu poétique ce qui n’est pas désagréable du tout.

Ce qui est absolument effrayant en lisant ce livre, c’est de voir à quel point le cynisme, la manipulation, la soif du pouvoir et de l’argent peuvent être présents et puissants dans notre société, et ce depuis longtemps, sans aucune humanité pour tout un peuple qui est humilié et exterminé (on parle bien de génocide). J’ai été effarée de constater comment on peut réécrire l’Histoire, non pas un siècle après… mais en même temps qu’elle se déroule… Simplement elle se déroule dans un même pays, mais à quelques centaines de kilomètres… loin de la dite civilisation qui s’écrit comme vérité des vainqueurs, des exterminateurs. Et Buffalo Bill Cody en est un exemple incroyable et effroyablement triste… car il y a perdu son âme, son identité, son humanité.

Avec son Wild West Show, il inventa le premier reality show, le premier grand show à l’américaine, avec des tournées incroyables aux Etats-Unis et dans le monde (même en France !) et des millions et des millions de spectateurs. Il a réinventé son histoire, sa vie, créant sa propre légende de son vivant mais réécrivant aussi l’Histoire, les victoires, les défaites etc. Il eut le culot et l’ignominie de faire jouer des Indiens qui ont dû accepter pour survivre. Ces Indiens obligés de jouer leur propre rôle mais réinventé par Buffalo Bill, sous les huées des spectateurs. Une horreur, une honte. Et pour tous, les mensonges véhiculés par le Wild West Show sont devenus réalité, vérité.…

Bien sûr ce n’était que le début de notre société de communication de masse…

Bref, vous l’aurez compris, c’est un livre indispensable, qui ne laisse pas indifférent et qui nous dit une vérité pas agréable à lire, mais nécessaire. Juste un petit bémol pour la fin, je n’ai pas compris pourquoi Eric Vuillard termine cet excellent livre sur la vie d’un photographe de l’infiniment petit, en particulier des flocons de neige… je n’ai pas compris le lien… il doit y en avoir un, mais il m’a échappé.

Livre à lire, sans aucun doute.

 

 

« Tous les regards sont tournés vers lui, Buffalo Bill. Mais il n'incarne pas seulement son personnage, l'ombre estime de son âme. Non. Il a fait sortir la flamme de terre, aspergeant le monde d'une pluie de tracts, prospectus, magazines où sa légende a été, ligne à ligne, fabriquée, peaufinée, et où l'apologie est devenue sans cesse plus habile. Et tout cela pour une œuvre exemplaire, exemplairement américaine, une formidable contribution à l'histoire de la Civilisation ».

 

 

Résumé éditeur :

On pense que le reality show est l'ultime avatar du spectacle de masse. Qu'on se détrompe. Il en est l'origine. Son créateur fut Buffalo Bill, le metteur en scène du fameux Wild West Show. Tristesse de la terre, d'une écriture acérée et rigoureusement inventive, raconte cette histoire.

 

 

« Très vite, dès le début de sa carrière, Buffalo Bill avait décidé que chaque représentation du show devait commencer de cette manière : un cavalier faisait un tour de la piste en brandissant le drapeau US, puis un orchestre cowboy jouait la bannière étoilée. Cet air deviendra par la suite l'hymne national des Etats-Unis - on voit comment l'Histoire se prosterne devant le spectacle ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Vuillard-Tristesse-de-la-terre/623501

 

 

« C’est alors que fusent les sifflets, les huées. Sitting Bull reste impassible, il effectue son tour de piste. Pas un instant on n’a songé lui faire jouer un épisode des guerres indiennes, un quelconque moment de sa vie : une simple parade devait suffire. Il n’y a pas d’Histoire possible. Le passé est entouré de gradins, et les spectateurs veulent voir ses fantômes. C’est tout. Ils ne veulent pas les entendre. Ils ne veulent pas leur parler. Ils veulent les voir. Ils veulent écarter un instant le rideau et voir l’Indien ».

 

 

« Dans chaque cimetière, il y a une division pour les pauvres, un petit carré mal entretenu, recouvert d’une lourde trappe, sans croix, sans nom, sans rien. Quelquefois un galet est posé par terre, un bouquet sec, un prénom est tracé à la craie sur le sol, une date. C’est tout. Il n’y a rien de plus émouvant que ces tombes. Ce sont peut-être les tombes de l’humanité. Il faut les aimer beaucoup ».

 

 

« Les baïonnettes déchiraient les bras, ripaient sur les crânes. On braillait des ordres impossibles à entendre. Les canons tiraient sur les tentes, au hasard. Les châlits s’écroulaient, carbonisés. On courait de toutes parts. Des chariots s’effondraient sous le poids des corps. Puis les canons se mirent à tirer en direction de la plaine afin d’atteindre les fuyards.

Soudain, il n’y eut plus un bruit. Ça faisait comme un drap dans le vent. Les soldats baissèrent leurs fusils. Que se passait-il ? Le silence avait quelque chose d’effarant. Les soldats se regardaient, interdits.

En contrebas, les Indiens étaient presque tous morts. Une fois réarmés les canons, il y eut encore deux, trois déflagrations. Puis des cris ; certains soldats suppliaient qu’on arrête. Il y eut même un hurlement, on ne sait pas de qui.

Ce fut tout.

Et il se leva une violente tempête. La neige tomba du ciel comme une injonction de Dieu. Les flocons tourbillonnaient autour des morts, légers, sereins. Ils se posaient sur les cheveux, sur les lèvres. Les paupières étaient toutes constellées de givre. Que c’est délicat un flocon ! On dirait un petit secret fatigué, une douceur perdue, inconsolable ».

 

 

« Oui, le spectacle brûle, n’en déplaise à ses détracteurs. Le spectacle nous dérobe et nous ment et nous grise et nous offre le monde sous toutes ses formes. Et, parfois, la scène semble exister davantage que le monde, elle est plus présente que nos vies, plus émouvante et vraisemblable que la réalité, plus effrayante que nos cauchemars ».

 

 

« Quelques indiens sauvages tournent autour des rangers en criant comme Buffalo Bill leur a appris à faire. Ils font claquer leur paume sur leur bouche, whou ! whou ! whou ! Et cela rend une sorte de cri sauvage, inhumain. Mais ce cri de guerre, ils ne l'ont jamais poussé ni dans les grandes plaines ni au Canada, ni nulle part d'ailleurs - c'est une pure invention de Buffalo Bill. Et ce cri de scène, cette formidable trouvaille de bateleur, ils ne savent pas encore qu'il leur faudra le pousser sans cesse, dans toutes les mises en scène où on les emploiera à jouer les figurants de leur propre malheur. Ils ne peuvent pas imaginer que tous les enfants du monde occidental vont désormais, tournant autour du feu, faire vibrer leur paume sur leur bouche, en poussant des cris de sioux ».

 

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28 novembre 2014 5 28 /11 /novembre /2014 23:10

 

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Il y avait longtemps que je n’étais pas allée au théâtre. J’aime le théâtre, même si je ne suis pas une spécialiste… j’aime voir, ressentir sur scène, tout près, une histoire… voir les acteurs, ressentir une ambiance, vibrer… j’ai tellement aimé plus jeune aller en Avignon pour son festival, unique… des vrais moments de bonheur.

Hier, se donnait à Charleville, au théâtre municipal, « Lucrèce Borgia », pièce de Victor Hugo, mise en scène par David Bobée avec en tête d’affiche, Béatrice Dalle pour ses premiers pas sur scène… oui la fameuse inoubliable Betty de « 37°2 le matin » de Jean-Jacques Beinex. Je vous avoue qu’à l’époque j’avais beaucoup aimé et j’avais été marquée par ce film fort, fou, plein de passion… et bien sûr en particulier par Béatrice Dalle. Sa sensualité animale me paraissait tout à fait adaptée à ce rôle, à ce personnage complètement sulfureux qu’est Lucrèce Borgia. Hummm je vous le dis de suite, déception totale de ce côté-là… mais attendons un peu avant d’aller plus loin. D’ailleurs, avant de parler plus en détails du spectacle, attention pour les personnes qui souhaitent aller voir ce spectacle qui je peux déjà vous le dire est un très très beau moment d’émotions, ne lisez pas la suite. Car je vais dévoiler donc spoiler des effets de mise en scène qu’il est franchement plus « fun » de découvrir au moment du spectacle !

 

La pièce, le contexte :

« Lucrèce Borgia est une pièce de théâtre en prose de Victor Hugo, représentée pour la première fois au théâtre de la Porte-Saint-Martin le 2 février 1833.

Elle raconte l'histoire de Lucrèce Borgia. Plus encore que dans les autres pièces de Hugo, le « grotesque » est poussé à l’extrême ».

Wikipédia

 

Je vous avoue que je n’ai pas lu cette pièce et qu’après avoir vu la représentation théâtrale, j’en ai très envie… je vous raconterai ! 

 

Résumé éditeur de la pièce d’Hugo :

Indifférente à la haine de l'Italie entière, Lucrèce Borgia parade au carnaval de Venise. Qui pourrait inquiéter cette femme de pouvoir qui baigne dans l'adultère, l'inceste et le crime ? Elle a peur cependant, et tremble. pour un simple capitaine qu'elle cherche parmi la foule. Il se nomme Gennaro. Il est amoureux d'elle, lui qui tient les Borgia en aversion et insulte leur blason. Or Gennaro n'est autre que son fils, né de ses amours incestueuses avec son propre frère, et le jeune homme ignore tout de son passé et de ses origines. Lucrèce est un monstre, mais aussi une femme et une mère. Comment protéger son enfant, comment le soustraire à la fureur d'un mari qui le croit son amant ?

En 1833, ce mélodrame tragique surpasse tous les triomphes de Victor Hugo.

 

Lien vers la fiche de la pièce sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Hugo-Lucrece-Borgia/9841

 

Voilà pour les faits… maintenant passons à cette mise en scène, très originale, pleine de punch… de David Bobée.

Ce jeune metteur en scène a fondé sa compagnie Rictus en 1999 à Caen. Il œuvre pour un théâtre sans frontières. Ses interprètes sont acteurs, danseurs ou acrobates, professionnels, amateurs ou en situation de handicap, et brillent par leur diversité de nationalités et de cultures. David Bobée est engagé dans une recherche théâtrale originale (il nous l’a prouvé hier à Charleville !). Depuis septembre 2013, il est directeur du Centre Dramatique National de Haute-Normandie, premier CDN à vocation transdisciplinaire.

 

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Résumé du spectacle :

Gennaro, soldat de fortune, ne sait de qui il est né. Lors d’un bal il rencontre à Venise la célèbre Borgia qui paraît vouloir le séduire mais les compagnons de Gennaro la reconnaissent et l’insultent.

Gennaro part avec ses compagnons à Ferrare où règnent Lucrèce et son époux Alfonse d’Este ; il injurie la duchesse en arrachant une lettre de son blason au fronton de son palais : Borgia devient alors Orgia… Alfonse d’Este imagine qu’il est l’amant de Lucrèce et tente de l’empoisonner ; mais Lucrèce le sauve, en le suppliant de fuir. Gennaro qui n’est pas parti, se retrouve en compagnie de ses camarades à une fête donnée par une jeune patricienne. Survient Lucrèce qui leur annonce qu’ils sont tous empoisonnés. Elle découvre avec terreur Gennaro et tente de le sauver. Mais, inexorable, il l’accuse et la poignarde.

 

 

Avant d’aller encore plus loin, je vous propose la distribution de la pièce :

Béatrice Dalle : Lucrèce Borgia

Pierre Cartonnet : Gennaro

Alain D’Haeyer : Don Alfonse d’Este

Radouan Leflahi : Jeppo

Marc Agbedjidji : Oloferno

Mickaël Houllebrecque : Ascanio

Juan Rueda : Apostolo

Pierre Bolo : Maffio

Jérôme Bidaux : Gubetta

Marius Moguiba : Rustighello

Catherine Dewitt : La Negroni

Composition musicale / Chant : Butch McKoy

 

 

 

Vous avez vu dans la distribution, un chanteur : Butch McKoy.

1ère originalité de la mise en scène que j’ai particulièrement appréciée… musique en live.

Quand débute le spectacle, ombre et lumière… une guitare, une voix… une belle ambiance s’installe.

« Butch McKoy, musicien et chanteur dans le spectacle Lucrèce Borgia, nous offre un concert acoustique en petit comité. Avec sa guitare, sa voix sensible et expressive, il nous entraîne dans une ambiance folk et dans un rock à fleur de peau ».

 

Je vous propose pour vous faire une idée, une vidéo de ce chanteur… ce n’est pas celle du spectacle de Lucrèce Borgia, mais cela donne une idée.

J’ai vraiment beaucoup aimé !!! 1er gros coup de cœur…

 

 

 

 

 

 

Le décor est dépouillé, moderne, souvent entre ombres et lumières… dans le fond, des rails métalliques portant des projecteurs de lumière, montent et descendent… Cela crée une ambiance très particulière, parfois intime, parfois inquiétante, glauque… Ce mur de projecteurs à la verticale reflète les corps en mouvement dans l’eau noire… Seules apparaissent très lumineuses, les lettres BORGIA.

 

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Dans l’eau… oui car la scène est composée d’un plateau d’eau et tout au long de la pièce, alternent différentes séquences de jeux d’eau, de jets d’eau… les acteurs y sautent, s’y vautrent, éclaboussent… cela donne une mise en scène originale, intéressante !

Les jeunes acteurs qui forment la bande d’amis de Gennaro sont comédiens, danseurs et acrobates. Ils ont un look très actuel, habillés comme les jeunes de nos jours, plutôt bien musclés (vous voyez les danseurs de hip hop ou de Capoeira). D’ailleurs, leur plastique irréprochable est bien mise en valeur ! 

 

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Ils sont très doués en danse et acrobatie, mais certains ont plus de prestance théâtrale et une meilleure diction que d’autres. Pour certains, cela a nui un peu à la bonne compréhension du texte. Heureusement, ce n’était pas les rôles principaux.

Pierre Bolo qui joue le rôle de Maffio, le très grand ami, le frère de Gennaro, sort du lot parmi ces jeunes acteurs. Gennaro qui est joué par Pierre Cartonnet est un peu moins bon… mais il s’améliore je trouve dans la 2e partie de la pièce.

 

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Un qui m’a paru vraiment excellent acteur et pour qui j’ai eu un gros coup de cœur est Jérôme Bidaux dans le rôle de Gubetta qui est l’homme de mains, l’homme des basses œuvres de Lucrèce Borgia. Il joue très bien, tout en finesse, avec plein d’humour, de dérision… Un vrai bon acteur de théâtre. Je viens de voir ceci à son propos dans une critique « Jérôme Bidaux, éblouissant Gubetta, chez qui la jouissance du mal ne se départ jamais de la mélancolie la plus noire »…

 

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Un autre qui est très bon aussi dans un autre genre est Alain D’Haeyer qui joue Don Alfonse d’Este, le 4e mari (et encore vivant ! exploit) de Lucrèce. Son jeu est subtile, puissant… très bien !

En face malheureusement, Béatrice Dalle fait pale figure.

Elle qui dit en interview qu’elle ne veut pas jouer Lucrèce mais l’habiter… et bien, elle n’y réussit point.

Le choc est rude dès son entrée. Son physique a changé depuis Betty… mais bon, c’est le lot commun à tous. Mais on ne la sent pas du tout à l’aise dans ses mouvements, complètement coincée… et le monologue qui débute son entrée est dit sans aucune émotion. Sa voix porte peu… et c’est le cas tout au long de la pièce.

Son jeu s’améliore un peu vers la fin… mais à peine.

J’en attendais peut être beaucoup, mais c’est vrai que vu sa personnalité, elle aurait pu, elle aurait dû ne faire qu’une avec cette Lucrèce Borgia, cette empoisonneuse, incestueuse, fille de pape et de courtisane à la réputation sulfureuse et détestable. Ce rôle était pour elle… et elle n’en fait rien. C’est dommage.

Heureusement, la puissance du texte, la mise en scène ingénieuse, pleine de vie, de surprises font que cette pièce reste une magnifique réussite et nous insuffle une énorme vitalité, une puissance, une force incroyable….

Je ne voudrais pas oublier de citer une actrice, Catherine Dewitt qui joue La Negroni, une princesse décadente… très bonne actrice, belle diction… elle aurait sans doute pu, ma foi, faire une belle Lucrèce Borgia !

 

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Originalité encore dans la mise en scène des combats… on ne voit aucune épée…. non… juste des combats de lutte à mains nues, de danses hip hop etc.

Et pour montrer la décadence extrême de cette société… une fête incroyable, très « sexuelle » où les hommes sont travestis avec des robes d’époque et dansent, s’enivrent… jusqu’à la mise à mort, terrible, dans une lumière rouge… rouge sang.

 

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Oui, dans ce spectacle, on va de surprises en surprises… et on en ressort habités, vivants…

 

Donc, vous l’aurez compris, j’ai passé une excellente soirée avec une très bonne amie !

 

 

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26 novembre 2014 3 26 /11 /novembre /2014 20:55

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« « La nouvelle comète d’Air France », pouvait-on lire sur les dépliants publicitaires. Le Constellation allait supplanter les palaces flottants et inscrire définitivement l’hégémonie du ciel sur la mer. Un oiseau chromé né de la folie d’un homme, Howard Hughes ».

 

 

J’avais envie de lire ce livre… Conseillé avec enthousiasme par ma kiné, il reçoit le Grand Prix du roman de l’Académie Française… Petit bémol, j’avais moyennement apprécié la prestation d’Adrien Bosc à la Grande Librairie, mais bon, pas de quoi m’arrêter.

Et bien, c’est rare, mais je n’ai pas accroché à la lecture de Constellation. L’idée de départ était bonne pourtant, même très bonne. Le crash de l’avion Constellation le 27 octobre 1949 qui est resté dans les mémoires car Marcel Cerdan était à bord. Il partait rejoindre Edith Piaf aux Etats-Unis et reconquérir son titre de champion du monde.

Adrien Bosc, par ce roman, avait le projet de redonner « vie » aux autres passagers, aux personnels aériens, les oubliés de l’Histoire… Toutes ces personnes qui se sont croisées quelques heures pour mourir ensembles aux Açores. Ainsi que ceux que le « hasard », la destinée, a épargnés. Pour diverses raisons, ils n’ont pas pris ce vol.

Sur le papier, intéressant, et qui aurait pu être passionnant, émouvant… mais non. La magie n’a pas fonctionné. A aucun moment, l’écriture d’Adrien Bosc m’a emportée, captivée… c’est relativement bien écrit, mais trop emmêlé, brouillon pour bien se repérer dans les évènements, les histoires. Avec trop de références dans tous les sens, pour bien appréhender les choses. De plus, parfois, même trop souvent à mon goût, Adrien Bosc fait référence à des évènements ou personnes qui n’ont rien à voir dans cette histoire. Un peu comme s’il voulait à tout prix les « placer », les plaquer… étaler sa culture ? (je suis sans doute trop dure). Les récits des différentes vies sont trop rapides, trop superficielles pour que l’on s’y attache.

Bref, premier roman que je vais vite oublier.

 

 

« Un concours infini de causes détermine le plus improbable des résultats. Quarante-huit personnes, autant d’agents d’incertitudes englobés dans une série de raisons innombrables, le destin est toujours une affaire de point de vue. Un avion modélisé dans lequel quarante-huit fragments d’histoires forment un monde ».

 

 

Résumé éditeur :

Le 27 octobre 1949, le nouvel avion d’Air France, le Constellation, lancé par l’extravagant M. Howard Hughes, accueille trente-sept passagers. Le 28 octobre, l’avion ne répond plus à la tour de contrôle. Il a disparu en descendant sur l’île Santa Maria, dans l’archipel des Açores. Aucun survivant. La question que pose Adrien Bosc dans cet ambitieux premier roman n’est pas tant comment, mais pourquoi? Quel est l’enchaînement d’infimes causalités qui, mises bout à bout, ont précipité l’avion vers le mont Redondo? Quel est le hasard objectif, notion chère aux surréalistes, qui rend "nécessaire" ce tombeau d’acier? Et qui sont les passager? Si l’on connaît Marcel Cerdan, l’amant boxeur d’Édith Piaf, si l’on se souvient de cette musicienne prodige que fut Ginette Neveu, dont une partie du violon sera retrouvée des années après, l’auteur lie les destins entre eux. "Entendre les morts, écrire leur légende minuscule et offrir à quarante huit hommes et femmes, comme autant de constellations, vie et récit."

 

 

« « Prends l’avion, le bateau c’est trop long ! » suppliait Édith la veille au téléphone, le Constellation traverserait l’Atlantique dans la nuit de jeudi à vendredi, il serait à New York au matin, il irait la réveiller. Ils passeraient la journée ensemble, le soir il l’écouterait chanter au Versailles. La prophétie est oubliée. Marinette au téléphone quelques minutes avant l’embarquement fait part d’un mauvais pressentiment, elle est angoissée, il ne lui connaît pas de telles alarmes. Il la rassure. Pendant ce temps, Jo Longman arrache aux hôtesses d’Air France trois places sur un vol pourtant complet. Le champion du monde vaut bien un droit de priorité dont font les frais Mme Erdmann, directrice d’une maison de parfum, et un jeune couple d’Américains en voyage de noces à Paris ».

 

 

Lien vers la fiche du livre sur Babélio

http://www.babelio.com/livres/Bosc-Constellation/618624

 

 

« Les passagers sont attachés, Marcel Cerdan plaisante avec Jo Longman tandis que Paul Genser a les yeux rivés au hublot. Ginette Neveu tient blotti contre elle l’étui de ses deux violons, un Stradivarius et un Guadagnini – une semaine plus tôt, elle n’en avait qu’un. Attaché aux strapontins, à l’avant de l’appareil, le personnel navigant se prépare à l’atterrissage. Terre en vue, 2 h 51, Jean de La Noüe annonce : « I have the field in sight ! » Le terrain en approche est plongé dans un épais brouillard, des lumières transpercent le voile céleste et l’équipage s’étonne de la pluie et de la chape grisâtre embrassant la carlingue. N’avaient-ils pas annoncé une visibilité parfaite à l’atterrissage ? L’incompréhension s’empare des trois pilotes ».

 

 

« À l’extrémité du pic, avachi et disloqué, le F-BAZN brûle encore. La tôle fracassée du fuselage s’étale en plaques difformes et calcinées. Le Connie n’est plus que ferraille dispersée. Le brouillard se mêle à l’incendie pour ne former qu’un seul et même nuage balayé par les vents. Pulvérisées, les ailes ont creusé la terre fangeuse tandis que les pales des hélices détachées et couchées composent les dernières marches du mont. Aucune trace des survivants dans ce spectacle de désolation. Les secours font l’amer constat que les silhouettes aperçues plus tôt déambulant autour des débris n’étaient que les pillards du village. La cargaison et les effets personnels du Constellation ont été dévalisés durant la matinée ».

 

 

« Et voici le Conte de la volute du Guadagnini, où la tête d'un violon passe de main en main, des Açores au Brésil jusqu'à un studio de télévision des Buttes-Chaumont, dans une émission au nom de Grand Echiquier, pour être authentifiée par le dernier luthier ayant verni le violon trente-trois ans plus tôt ».

 

 

 

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