« Il avait engagé un pari avec le destin. S’il survivait à cette randonnée, il se ferait une raison. Sinon, il remettrait son sort entre les mains des dieux. Le pluriel était intentionnel. Il n’arrivait pas à croire à un Être suprême unique, pianotant sur un clavier d’ordinateur divin, insérant tel élément ou en supprimant à jamais tel autre ».
Je suis assez fidèle, quand j’aime un auteur, je le suis… c’est le cas par exemple d’Elizabeth George. Je viens de terminer « Le rouge du péché ». On y retrouve notre cher commissaire Thomas Lynley, 3 mois après l’assassinat de sa femme Hélène. Complètement détruit, il a laissé derrière lui Scotland Yard, sa famille, ses amis… et on le retrouve sur un chemin côtier de Cornouailles… marchant, encore et encore, pour s’épuiser, ne pas penser et aller dans des endroits quasi déserts et où en tout cas, il ne rencontre que des personnes ne le connaissant pas et surtout ne connaissant pas son histoire, sa femme…
Et comme de bien entendu, il tombe sur un cadavre… un crime… et le voilà, contre son gré, mêlé à l’enquête… bon gré, mal gré, le revoilà plongé dans le monde des vivants… et notre si particulière et aimée Sergent Barbara Havers qui arrive… bref, encore un très bon roman d’Elizabeth George… je me régale… je conseille sans modération !
« C’était pour fuir tout ce qui lui rappelait Helen à Howenstow qu’il avait entrepris de parcourir la totalité du sentier côtier du Sud-Ouest. Une telle randonnée était bien la dernière chose qu’aurait tentée Helen (« Mon Dieu, Tommy, tu es fou ? Les chaussures de marche sont toutes tellement hideuses… »). Rien sur le trajet ne risquait de le faire penser à sa femme.
C’était compter sans les mémoriaux qui jalonnaient le sentier. Rien de ce qu’il avait lu avant de se mettre en route ne l’avait préparé à cela. Depuis les simples bouquets de fleurs agonisantes jusqu’aux bancs gravés aux noms des défunts, la mort le défiait presque tous les jours, au mépris des efforts qu’il déployait pour l’oublier ».
Résumé éditeur !
Inconsolable trois mois après le meurtre de son épouse, Thomas Lynley erre le long des côtes de Cornouailles, loin de l'absurdité du monde. Lorsqu'il découvre le cadavre d'un jeune grimpeur au pied des falaises, son retour à la réalité est brutal. Chargée de l'enquête, l'inspecteur Bea Hannaford renonce vite à considérer comme suspect le vagabond aux vêtements crasseux qui présente des papiers au nom de Thomas Lynley. En manque d'effectifs, elle le met à contribution : il est certes un témoin, mais, une fois son identité vérifiée, elle ne doute pas que son expérience de commissaire au Yard pourra s'avérer utile. Dans ce pays sauvage de falaises et de mer démontée, Lynley participe à contrecœur aux investigations mais reprend pied peu à peu. Il retrouve son éternelle partenaire, Barbara Havers, que Londres a dépêchée sur place autant pour collaborer à l'enquête que pour mener à bien une mission délicate : récupérer Lynley. Après le succès d'Anatomie d'un crime, son grand roman social, Elizabeth George renoue avec son art consommé du suspense et tisse une intrigue d'une incroyable densité, multipliant les fausses pistes et les faux coupables. Un roman magistral qui, après trois ans d'absence, marque le retour tant attendu de Thomas Lynley et Barbara Havers.
« — Santo et moi étions très proches. Vous êtes proche de votre mère, Cadan ?
— Non.
Il n’ajouta pas qu’il était impossible d’être proche de Wenna Rice Angarrack McCloud Smythe, alias la Bougeotte. Elle n’était jamais restée assez longtemps au même endroit pour ça.
— Santo et moi étions très proches, répéta Dellen. Tous les deux, nous étions des sensuels. Vous savez ce que ça veut dire ?
Elle ne lui laissa pas l’occasion de répondre, mais de toute façon il aurait été bien en peine de lui donner une définition.
— Nous vivons pour et par les sensations, enchaîna-t-elle. Pour ce que nous voyons, entendons et respirons. Pour ce que nous goûtons. Pour ce que nous touchons. Et pour ce qui nous touche. Nous jouissons de l’existence sans mauvaise conscience et sans crainte. Santo était comme ça. Voilà comment je lui ai appris à vivre ».
Lien avec la fiche du livre sur Babélio
« Du coup, quand elle trouva Barbara Havers en train de parcourir le programme de la journée sur le tableau blanc, Bea la considéra d’un œil critique. Cet examen visait à évaluer sa conscience professionnelle, non à porter un jugement sur ses goûts vestimentaires pourtant désastreux. Ce jour-là, le sergent Havers portait un pull marin avachi par-dessus un tee-shirt à col haut orné d’une tache de café, un pantalon en tweed vert olive trop court d’au moins trois centimètres et démodé depuis une bonne dizaine d’années, et les mêmes baskets rouges que la veille. On aurait dit un croisement entre une clocharde et une réfugiée de guerre habillée par l’Armée du salut ».
« A quoi bon essayer d’imposer sa volonté à un adolescent quand il possédait sa volonté propre ? Après tout, nul n’était obligé de faire la même chose que ses parents. Sinon le monde n’évoluerait jamais, et serait peut-être même dépourvu d’intérêt. Tout y serait d’une monotonie effroyable, génération après génération. D’un autre côté, ce ne serait peut-être pas plus mal ».
« Les articles des journaux – tabloïds, magazines, peu importe – ne mentionnent que les évènements spectaculaires, poignants, sordides. Ils ne citent jamais ces pans d’existence composés de détails quotidiens, à la fois précieux et inoubliables. Pas assez dramatiques… Et pourtant, au bout du compte, ce sont ces moments-là qui nous définissent ».
« On pouvait qualifier ces évènements de bons ou de mauvais, on pouvait dire simplement qu'ils faisaient partie de la vie. Et celle-ci se poursuivait. On n'obtenait pas ce qu'on voulait, et c'était comme ça. On pouvait maugréer ou on pouvait faire front. Un jour, il avait vu à la bibliothèque une affiche qui disait : "Quand la vie vous offre des citrons, faites de la citronnade". Sur le coup, il avait trouvé ça idiot mais, dans le fond, ça ne l'était pas tant que ça ».
« Cette supplique était le leitmotiv de leur couple. Depuis toujours, il ne vivait que pour la servir, et elle ne vivait que pour être servie ».
« Tu vois c’est pour cette raison que je dois sans arrêt m’acheter des chaussures neuves. Je mets si souvent les pieds dans le plat que toutes mes paires sont bousillées ».
« Les photos servaient à fixer les souvenirs heureux. Elles étaient les instruments qui nous servaient après coup à fuir la vérité ».